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Service clients


Y'a plus de pain

« Y’a plus de pain ?!? »

 

Avant même de dire bonjour…

 

Sur les étagères, on peut voir 2 sortes de pain différentes, et quelques baguettes de 3 sortes différentes. Selon toute logique, il y a encore du pain…

 

Mais voilà, ce cher monsieur, tout habitué qu’il est à l’abondance en toute chose a perdu toute mesure, et même toute capacité basique d’observation.

 

« Et bien si, il nous reste du pain, regardez…

-Oui, mais y’a que ça ? »

 

Il y a juste de quoi tenir une semaine ! Serait-il venu avec sa famille élargie comprenant pas moins de 170 membres ? Si c’est le cas, je reconnais que, oui, ce qui nous reste pourrait être un peu juste. Mais si toute sa bande se résume aux deux personnes qui l’attendent dans la voiture garée sur la terrasse, juste devant la porte, alors, disons que j’ai le sentiment que ce qu’il nous reste devrait pouvoir leur suffire jusqu’au lendemain.

 

Je fais taire toutes ces petites voix qui lui feraient bien bouffer chaque baguette par tous les orifices connus, et j’arbore mon plus beau sourire :

 

« C’est tout ce qu’il nous reste pour ce soir. Mais nous ouvrons demain à 7h, si vous voulez avoir du pain frais de bon matin. »

 

Je ne lui fais pas remarquer qu’il est 18h30 et que la boulangerie ferme à 18h… Ce serait mesquin.

 

Il me répond, toujours aussi dépité :

 

« Oui, mais pour ce soir, on fait comment ? Et puis 7h, on ne peut pas venir plus tôt ? »

 

J’efface les images des supplices les plus sanglants qui me viennent à l’esprit.

 

 - Pour demain, nous sommes là un peu avant 7h, si vous voulez. Sinon, l’autre boulangerie ouvre à 6h. Pour ce soir, combien êtes-vous ? Vous vouliez faire une fondue peut-être ? Je peux regarder en bas et vous donner du pain d’hier, qui sera idéal pour la fondue. 

 

- Non, non, pas de fondue. Nous serons deux ce soir. Mais bon… 

 

- Ah… Vous avez une préférence ? Nous avons la boule de campagne, celui-ci est au levain, cette baguette est aux céréales…

 

- J’veux juste du pain.

 

- Bien, il nous reste des baguettes blanches. Il vous en faut combien ?

 

- Une demie. »

 

Que dire ? Le client est roi. Même s’il est complètement abruti.

 

Terrassée par tant de bêtise, je succombe et lui dis en lui rendant sa monnaie :

 

« Demain soir, essayez de passer avant 18 h, car c’est l’heure normale de fermeture. »

 

Là, ça fait du bien ! Mais voilà, j’avais sous-estimé l’étendue des dommages subis par ce monsieur. Avec un aplomb superbe, il me répond :

 

« Bah, alors, pourquoi vous êtes encore là, et pourquoi vous m’avez servi si c’est fermé ? »

 

Je suis à terre, les yeux révulsés… Abasourdie, je ne peux rien répondre et le regarde sortir et remonter dans sa grosse voiture, avec sa demi-baguette sous le bras.

 

Le client est parfois vraiment le roi des cons !

 


29/11/2016
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Le petit manteau

Madame,

 

Vous êtes devant moi, toute serrée dans ce petit manteau. Je vous salue en passant lorsque vous m’arrêtez pour me demander mon avis…

Que puis-je vous dire ? Deux choix radicaux s’offrent à moi...

 

Je pourrais vous vanter les mérites de ce manteau et vous dire à quel point vous le portez bien, qu’on le dirait fait pour vous, que sa ligne vous met vraiment en valeur, et que, c’est certain, vous ne regretterez pas cet achat. Je pourrais vous vendre les accessoires indispensables, qui apporteront une touche d’élégance et de gaieté à ce petit manteau, qui, vous l’ai-je déjà dit ? vous va vraiment à merveille. Je pourrais vous rappeler que ce modèle est indémodable et qu’il est une ode à toutes les femmes, mais, que, entre nous et sans vile flatterie, les femmes plus mûres le portent encore mieux…

 

Cette option est certes fort courtoise, mais elle témoigne surtout d’une grande hypocrisie. Envisageons maintenant la deuxième option.

 

En toute franchise, je vous dirais que ce petit manteau est vraiment beau, qu’il a une coupe élégante et féminine, mais que là, vraiment, vous ne le mettez pas en valeur, toute boudinée que vous êtes dedans. Pourquoi, Madame, choisissez-vous de vous saucissonner dans un XS, alors que vous faites un bon S, voire un M ? Pourquoi ne pas accepter que vous ne rentriez pas dans un XS ? Ne vous rendez-vous donc pas compte que vous allez faire craquer les coutures, et peut-être même la fermeture éclair, si vous persistez à vouloir porter ce manteau trop petit pour vous ? De plus, en tant que manteau, il doit se porter par-dessus d’autres vêtements… Alors, pensez que ce XS va vite devenir un double XS ! Je pourrais ajouter qu’à votre âge, il serait temps de réaliser que vous boudiner dans des vêtements trop petits ne vous met absolument pas en valeur physiquement et colle une étiquette peu édifiante sur votre personnalité. Alors, faites-vous un cadeau et oubliez ce petit manteau.

 

Ces deux options n’étant pas réalistes, j’opte pour une version plus édulcorée, où je m’efforce de faire preuve de diplomatie. « Ce manteau est vraiment joli, et vous en serez très contente. Il vous va très bien, mais je crois qu’une taille au-dessus serait peut-être plus élégante… ». À cela, vous me répondez, pleine d’aplomb et d’une pseudo-candeur, inexcusable à votre âge, « Oui, mais j’achète toujours des vêtements trop petits pour moi. »… Les bras m’en tombent. Que puis-je répondre à cela ?

 

Alors ma p’tite dame, si vous vouliez que je cautionne ce qui est une faute de goût à mes yeux, il fallait me le dire dès le départ. Ne me demandez pas mon avis. Dites-moi directement ce que vous voulez, à savoir un encouragement, une validation de votre choix, quel qu’il soit. Ne me faites pas perdre mon temps à essayer de trouver les mots justes pour vous aider et pour donner mon avis sans vous blesser. Si vous achetez toujours des vêtements trop petits pour vous. Et bien, allez-y ! Continuez ! Ce manteau est bien trop petit pour vous et ira à merveille avec le reste de votre garde-robe. Madame, vous avez fait là un excellent choix et je ne peux que vous encourager à acheter ce manteau sans attendre, de peur qu’il ne soit plus disponible. Ah oui ! J’oubliais, avez-vous vu ces petits gants ravissants, qui, accompagnés d’une petite écharpe et d’un petit bonnet, apporteront une touche de couleur à cet élégant manteau ?

 


29/11/2016
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Histoire de mites

Cher Monsieur,

 

Je fais suite à votre appel au sujet des trous de mites dans vos vêtements. Comme vous pouvez le constater, le fait de m’avoir raccroché au nez ne m’a pas offusquée au point de ne pas faire de suivi.

 

Je récapitule donc vos propos : vous avez acheté vos t-shirts il y a plus de 5 ans. Vous les avez stockés dans des malles, et, en les sortant, vous avez constaté qu’ils étaient pleins de trous de mites… Mites que vous reconnaissez être les vôtres. Donc, vous m’appelez en reconnaissant que vous êtes largement hors de notre période de garantie (qui est de 1 an pour tous les problèmes de malfaçon) et que les trous ne sont absolument pas dus à un problème de fabrication ou de faiblesse du tissu. Jusqu’ici, je ne peux que saluer votre honnêteté et votre capacité à reconnaitre vos torts.

 

À ce stade, j’aimerais faire une pause, histoire de calmer mes nerfs. J’aimerais vous poser une question : auriez-vous l’aplomb d’acheter de la viande hachée, de la laisser en plein soleil pendant deux heures, et de la rapporter à votre boucher pour demander une compensation ? Attention, il y a un piège. Réfléchissez bien.

 

Ça y est ? Bien. Est-ce que l’extrême clairvoyance dont vous avez fait preuve en reconnaissant les faits exposés ci-dessus vous permet de faire un parallèle entre vos t-shirts et la viande hachée ?

 

Non ? Vous ne voyez aucune similitude ? Ah. Je vois. C’est ennuyeux. Mais, notez que, vu votre démarche, ça ne me surprend qu’à moitié.

 

Mais, après tout, dans le contexte actuel, où tout est fait pour assister les clients et aller même au-delà de chacun de leurs désirs, je ne suis pas si surprise que ça. Mais, vous ne m’empêcherez pas d’être agacée, voire ulcérée de devoir faire toujours plus pour les gens, au point de leur faire perdre tout point de repère, au point de leur faire perdre toute notion du réel, voire tout respect d’eux-mêmes. Car, franchement, n’avez-vous aucune automesure ni aucune estime de vous pour venir me demander un geste commercial quand tout est de votre faute ?

 

Enfin, il semblerait que ce soit la tendance. Alors peut-être est-ce vous qui êtes dans le vrai et moi qui me trompe. Mouais… Disons, que si c’est le cas, je reprendrai ma formule favorite : « Le monde marche sur la tête. ».

Je vous souhaite bonne chance dans vos futures démarches. Je crois, ou plutôt, je crains, à mon grand désespoir, que vous n’ayez plus souvent gain de cause que moi.

 

En attendant, et au risque de me faire taper sur les doigts, je ne vous proposerai aucune sorte de compensation pour vos vêtements. Le fait de m’avoir raccroché au nez a influencé, soyez-en sûr, ma décision. Vous vous rendez-compte ? Vous êtes arrivé à perdre votre contenance et toute civilité pour des t-shirts ? Ne trouvez-vous pas cela un peu extrême comme réaction ? N’avez-vous aucune autre cause à défendre avec autant d’ardeur, plutôt que de vous essouffler pour des vêtements ?

 

Je finirai tout de même sur une note positive. Je vous remercie de votre démarche. Elle m’a permis de m’émerveiller. Oui, je m’émerveille devant tant de futilité, d’audace et d’assurance. Finalement, vous m’avez beaucoup appris, et vous me laissez tout ahurie…

 


29/11/2016
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Intro

Mes années au contact direct de la clientèle m’ont nourrie en anecdotes savoureuses. Si j’ai toujours mis un point d’honneur à offrir un service de grande qualité, il m’est souvent venu à l’esprit des réponses toutes différentes de celles que je faisais…

 

J’ai voulu donner vie à ces pensées parfois déviantes en écrivant ce qu’un représentant d’un service client qui aurait oublié que le client est roi aurait pu répondre.


29/11/2016
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