Petites histoires du soir
Voici quelques petites histoires que j'ai écrites pour mes beaux-enfants, en m'inspirant de leurs aventures.
Rangez votre chambre
Mes années au contact direct de la clientèle m’ont nourrie en anecdotes savoureuses. Si j’ai toujours mis un point d’honneur à offrir un service de grande qualité, il m’est souvent venu à l’esprit des réponses toutes différentes de celles que je faisais…
J’ai voulu donner vie à ces pensées parfois déviantes en écrivant ce qu’un représentant d’un service
— Rangez votre chambre !
Nous, les enfants, entendons ça au moins 100 fois par jour. Quelle est cette maladie qui touche tous les parents ? Je ne vois pas ce qui les dérange si les legos traînent par terre, entourés de nos chaussettes. Après tout, c’est notre chambre. Est-ce que nous allons dans leur chambre pour contrôler que tout est en ordre ? Ils se croient vraiment tout permis. C’est sûr, quand je serai grand, je ne dirai jamais ça à mes enfants. Promis juré.
Mais, que se passe-t-il ? Kine ! Kine, j’ai dit ! Où est passé mon sweat Spiderman préféré ? Il me le faut absolument ! Je ne peux pas aller à l’école sans lui. Je cherche partout : dans le placard, sous le lit, dans mon lit… Partout je vous dis !
Maman vient m’aider et finit par le retrouver, caché dans ma boîte de legos sous l’escalier. Qui a bien pu le mettre ici ? C’est un vrai mystère. En tout cas, je suis content de l’avoir retrouvé. Merci Maman.
Le lendemain, c’est ma sœur, qui a perdu sa poupée préférée. En la cherchant, elle a déchiré une jupe qui était coincée sous une étagère et a cassé mon super vaisseau spatial en marchant dessus. Elle s’est fait très mal au pied et nous avons pleuré tous les deux.
Le pire, c’est que, par-dessus le marché, Maman nous a grondés. Elle nous a dit que si nous avions rangé notre chambre… bla bla bla… Vous voyez la suite.
Après un moment, ma sœur et moi, on a décidé de ranger notre chambre.
Whaou ! Vous n’avez pas idée de ce qu’on a trouvé ! Ma sœur a retrouvé sa poupée, moi, mes chaussettes de foot et ma boîte de stickies, que j’avais perdue il y plusieurs mois. Et je ne vous fais pas la liste complète ! Quand nous avons terminé, on a regardé notre chambre et on s’est dit qu’elle était bien plus jolie et semblait plus grande comme ça. Avec tout ce que nous avions retrouvé et avec cette nouvelle chambre, on a pensé que les grands avaient peut-être un peu raison de nous répéter de ranger notre chambre.
Mais, attention, hein, j’ai dit « peut-être » et « un peu », parce que, quand même, c’est pas très amusant de ranger…
Qui aurait oublié que le client est roi aurait pu répondre.
La tablette ne marche pas
CA-TA-STRO-PHE ! TRA-GÉ-DIE !
Ce matin, je devais passer au niveau 10 de mon jeu Star Wars, mais la tablette est en panne. C’est horrible ! Comment vais-je survivre ? Qu’est-ce que je vais faire ? Je suis désespéré. Le pire, c’est qu’autour de moi, personne ne semble se rendre compte de la situation.
- Ce n’est pas si grave. On va jouer ensemble. Ça ne te fera pas de mal, me dit ma belle-mère.
Des fois, elle est vraiment trop nulle, celle-là. Elle ne comprend vraiment rien.
Ma sœur me nargue, bien contente que je ne puisse pas jouer à la tablette et mon père semble s’en ficher complètement.
Je n’ai qu’une envie : aller me recoucher en attendant que la tablette soit réparée.
Mais Papa en a décidé autrement. Après le déjeuner, il prépare un sac et me dit qu’on va aller tous les deux faire du vélo dans les bois. Il a l’air très excité ! Mais, comment est-ce que je pourrais l’être alors que Luke est coincé au niveau 9, et qu’il pourrait être en train de progresser dans le 10 ?
Je continue de bouder en enfilant mon casque et nous partons à vélo. Sur la route, Papa s’arrête près d’un ruisseau. Que se passe-t-il ? Je m’arrête aussi et il me montre un paquet de petites boules gélatineuses avec un point noir au milieu.
- Ce sont des œufs de grenouille, dit Papa. Ils vont bientôt se transformer en têtards.
Je ne suis pas très impressionné. Je vois bien qu’il essaie de me distraire. Mais il n’est pas très fort.
On repart et on pédale jusqu’au bois. Là, Papa me dit qu’on va construire une cabane. M’ouais… D’accord. On y passe au moins deux heures. Elle est super notre cabane ! Elle est grande, avec quatre murs, un toit solide, une porte et deux fenêtres. On a vraiment bien travaillé.
- Les cabanes, c’est un truc d’homme, dit Papa.
- C’est sûr ! Si les filles étaient venues, elles nous auraient embêtés avec des rideaux et des fleurs ! répondis-je
Ça a bien fait rire Papa.
Au goûter, il a sorti une gourde et des biscuits de son sac. Il est vraiment trop fort ce papa ! Nous avons goûté tous les deux dans notre cabane. On était les rois du monde !
Au retour, nous nous sommes arrêtés près du ruisseau et Papa a mis des œufs de grenouille dans un pot. Quand nous sommes arrivés à la maison, il les a mis dans un seau avec de l’eau. On allait bientôt avoir des têtards ! Super !
Quand les filles sont rentrées, nous leur avons montré les photos de notre cabane. Elles ont été très impressionnées. On leur a promis de les inviter à goûter, si elles promettaient de ne pas nous embêter !
Vraiment, quelle belle journée passée avec mon papa !
Et puis, en venant me souhaiter bonne nuit, ma belle-mère m’a annoncé une très bonne nouvelle : la tablette serait bientôt réparée !
Super ! J’allais pouvoir accéder au niveau 10 !
En attendant, j’avais hâte de retourner dans notre cabane et de voir les têtards nager dans le seau.
Le congrès des petits orteils
Aïe ! Ouille ! J’ai mal ! Pourquoi ça tombe toujours sur moi ! J’en ai marre !
Dure vie que celle des petits orteils. Partout dans le monde, à tout âge, ils subissent d’affreuses tortures. Un angle de mur un peu saillant ? C’est pour eux. Le coin du canapé ? Encore pour eux !
Ils souffraient tant qu’ils décidèrent d’organiser un congrès pour trouver une solution.
Petits, grands, dodus ou gringalets, ils étaient des millions. Certains petits doigts de la main s’étaient même invités.
La première journée, les palabres se prolongèrent tard dans la nuit. Beaucoup d’idées furent lancées. Toutes plus saugrenues les unes que les autres. On suggéra ainsi de changer de place avec un autre orteil, de s’entourer de protections en mousse, de se doter de radars et d’alarmes, ou encore de se faire hara-kiri dès la naissance. Bien sûr, aucune de ces propositions n’était réaliste. Ce soir-là, ils allèrent tous se coucher la tête basse. Ils étaient un peu découragés.
Le lendemain, ils se rassemblèrent à nouveau. Une fois installés, l’un d’entre eux leva le petit doigt pour prendre la parole. On lui tendit un micro. Il était encore tout bleu de sa dernière rencontre avec le pied de la table du salon.
— Voilà, dit-il, hier, beaucoup d’idées intéressantes ont été proposées. Mais, vous conviendrez avec moi qu’aucune ne semble être une bonne solution.
Tous acquiescèrent.
— Alors, j’ai pensé à quelque chose. Nous pourrions prendre le contre-pied, si vous me permettez l’expression, de ces situations très douloureuses. Je m’explique : à chaque fois que nous heurtons quelque chose, au lieu de pleurer et de hurler de douleur, pourquoi ne pas faire une pause et donner une note à notre douleur. Nous pourrions ainsi établir un palmarès et transformer notre malheur en jeu. Je propose même de faire une petite fête et quelques pas de danse à chaque fois qu’on attribue une note supérieure à 8/10. Qu’en pensez-vous ?
L’assemblée resta d’abord silencieuse. Puis, tous les petits orteils présents se levèrent et applaudirent cette grande idée. Les petits doigts de la main se promirent d’en parler à leur prochain colloque.
Depuis, à chaque fois qu’un petit orteil se cogne sur quelque chose, on peut l’entendre se demander quelle notre il attribue à sa douleur et, si on regarde bien, dans certains cas, on peut les voir faire quelques pas de danse…
Une journée pourrie
Aujourd’hui, Elliott a eu une sale journée…
Tout a commencé dès le réveil. Quand il s’est levé, il a marché sur son lego préféré. Bien sûr, il s’est fait mal au petit orteil. Au petit-déjeuner, plus de Nutella !
Une fois à l’école, la maîtresse lui a fait recommencer trois fois son exercice, car il se trompait. Ah là là, quelle sale journée !
À midi, à la cantine, c’était la cata : purée d’épinards au menu… Elliott se dit, que, décidément, tout était contre lui. Mais, le pire de la journée était encore à venir… À la récré, personne ne voulut jouer avec lui. Pauvre Elliott, sa journée était vraiment pourrie.
Sur le chemin du retour, il raconta cette horrible journée à sa grande sœur Salomé. Cette dernière eut alors une idée…
La journée n’était pas finie ! On pouvait encore faire quelque chose pour qu’Elliott retrouve le sourire ! Mais chut… Voyons ce qu’elle prépare…
Elle demanda d’abord à Elliott de l’attendre quelques minutes. Elle entra dans le supermarché et sortit quelques pièces de son porte-monnaie. Tant pis pour son magazine préféré. Elle acheta un pot de Nutella, qu’elle cacha dans son sac. Quel goûter ils allaient se faire !
Une fois à la maison, Salomé prêta sa tablette à Elliott, chose qu’elle ne faisait pas souvent, et lui dit d’aller se mettre dans sa chambre.
Pendant qu’Elliott jouait à son jeu favori, Salomé prépara un goûter de fête, sur le thème du Nutella. Tartines, sucettes, gâteaux fourrés… Puis, très rapidement, elle organisa une mini chasse au trésor dans la maison.
Quand tout fut prêt, elle appela Elliott. La tête basse, il entra dans la cuisine… Quelle belle surprise ! Salomé avait dressé une belle table pleine de couleurs pour le goûter. Le sourire retrouvé, il dévora toutes les bonnes choses au Nutella. Quand, après le goûter, Salomé lui tendit le premier indice de la chasse au trésor, Elliott sauta de joie.
Ce soir-là, au moment de s’endormir, Elliott remercia sa sœur pour la belle journée qu’il avait passé grâce à elle. Il avait rangé le reste de sa journée dans les mauvais souvenirs à oublier.